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Humanisme : essai de définition

Fédéralistes et humanistes. Ce sont probablement les deux adjectifs qui qualifient le plus souvent la famille “démocrate”.

Si le droit public comparé, notamment avec les Etats-Unis ou l’Allemagne, nous permet de passer outre la conception jacobine de la politique française pour définir précisément ce qu’on entend par fédéralisme, l’humanisme demeure une notion floue. On lui reproche de faire partie de ces “mots-valises” transportant tant de contenus qu’il serait vidé de sa substance.

Au fil de mes expériences politiques et de mes lectures, cette appellation n’a jamais cessé de m’interroger. Je crois que je suis arrivé au terme d’une première étape à l’issue de laquelle j’aimerais proposer une définition. La vie est encore longue et notre langue est vivante, j’y reviendrai sans doute mais voici ce que je souhaite faire de l’humanisme.

L’humanisme : une raison de faire société humaine

Toute forme de vie commune recherche le principe associatif qui rassemble ses sociétaires par un tout supérieur à la somme de ses parties. L’humanisme serait - selon moi - le principe qui associe les êtres humains, c’est-à-dire qui forge la conscience d’appartenir à l’Humanité. Il définit cette communauté fondée sur l’attachement aux droits humains, c’est-à-dire aux libertés les plus fondamentales, issues du droit naturel. Cette communauté qui regroupe les êtres dotés de raison.

Pour certains auteurs, cet attachement aux droits humains est un vecteur sans valeur associative (Pierre Manent, Situation de la France). Bien au contraire, je crois que c’est l’esprit des Lumières, certes à visée universaliste, qui associe les hommes par la recherche collective de la Justice, consacrée en France dans notre magnifique devise : Liberté, Égalité, Fraternité. Il s’agit d’un idéal qui met en mouvement partout : de même que défilaient de République à Nation des milliers de Français le 11 janvier pour scander notre devise, de même l’attachement aux droits humains a été déclaré partout. Il en résulte que l’humanisme peut constituer une véritable raison de faire société.

L’humanisme : une certaine idée des limites humaines

L’humanisme ne répond pas seulement à la question “pourquoi vivons-nous ensemble ?” Il s’adresse également à la question cruciale de notre dignité ontologique : quelle place occupe l’humanité en tant qu’espèce ?

L’Ancien Testament présente une Alliance entre Dieu et les Hommes pour que ces derniers achèvent la Genèse ; c’est un appel pour l’Homme à parachaver de la création commencée par Dieu. Les mythes antiques, au premier rang desquels celui de Prométhée, nous amènent à réfléchir aux limites de cette responsabilité de co-création. La littérature moderne, en la personne du Dr. Frankenstein, y fait écho : co-responsables de la création, nous ne sommes pour autant pas démiurges - sauf à se porter garant de la création d’un monstre.

L’humanisme apparait donc comme la conscience de ce chemin de crête qui existe entre le pouvoir de créer et la responsabilité du progrès. Il trace une ligne ontologique qui définit les contours de l’humanité. De même qu’il pose les droits fondamentaux, leur construction et leur préservation, en principe associatif, de même il définit les limites de l’être humain. Co-créateur mais pas alchimiste, sa nature lui permet de transformer le réel mais le garde responsable de toute transgression, de l’apparition d’un être “contre-nature”.

L’humanisme : la confiance en l’Homme pour se façonner lui-même

La frontière est floue entre ce qui est naturel et ce qui ne le serait pas. Et pour cause, elle repose entre les mains d’un être faillible. Remettre l’éthique à l’humain est un pari. Cette prise de risque nous emmène donc à conclure que l’humanisme est une forme de crédulité, de confiance simple en l’humanité, en sa capacité à rechercher la justice et définir ses propres limites, tout en préemptant le pardon nécessaire pour dépasser toutes les erreurs intermédiaires.

Pardonner est un exercice majeur de discernement, qui repose sur cette même confiance. L’humanisme a donc pour corollaire une pratique aiguë de la conscience, du rapport au temps : en disséquant le passé, l’homme ouvre les possibles du futur pour agir dans le présent, en premier lieu, revenir sur ses erreurs. En somme, l’humanisme est un exercice de la modernité, c’est ouvrir ce qu’Hannah Arendt (La crise de la culture) appelle la brèche du temps puisque “notre héritage n’est précédé d’aucun testament”.

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